CLEMENT CHABERNAUD AEROPLANE

JE RÊVE
en couleur.
Loin de toutes ces fantaisies, je passe mon temps à rêver. Loin de tous ces problèmes, je passe mon temps à contempler. Contempler ce vide que mon âme s'amuse à remplir. Comme aiguisant de fines lames sans jamais défaillir. Je pourrais vous compter nombreuses de mes histoires, mais jamais, ô grand jamais au fond de mes yeux vous ne trouverez désespoir.

AEROPLANE →

17 ans →

4/7 →

Je le trouve absolument parfait, au contexte divin. Il me rappelle un peu STH dans les grandes lignes. →

©AEROPLANE

Il y a cette immense serrure. Personne ne peut l'attendre. On a beau croire qu'elle se tiendrait à portée de mains, mais lorsque l'on tend le bras, plus rien. Il y a cette immense porte, un œil azure vous fixant, une voix rocailleuse et grave vous demandant de passer votre chemin, le reste n'est que blanc, le reste n'a pas d'importance. Seulement cette porte dont il vous manque la clé. C'est certainement cela qui me rassure le plus, le fait qu'elle soit verrouillée. Car cette porte, elle débouche sur mon âme, sur mes pensées, mes désirs, mes tourments, tout ce qui peut se rapporter de près ou de loin à ma personne. L'ouvrir c'est franchir une ligne que personne n'a jamais franchi, c'est ouvrir son âme à un monde nouveau. Car derrière cette porte, se tient aussi mon cœur, prisonnier des chaines, prisonnier de tout, sauf de toi. Sauf de lui. Mais vous n'avez pas la clé, non, vous ne l'avez pas, et ne l'aurez certainement jamais. Car je n'accorde que très peu de ma confiance aux gens extérieurs. L’œil parcoure votre corps de haut en bas, il vous demande de partir, encore. La voix qui résonne est la mienne, mais jamais je n'aurais employé ce ton. Ceci est un rêve, et je ne suis pas seulement dans celui ci, je suis ce rêve, autant que vous l'êtes si ce n'est plus. Vous longez les murs blancs, tout n'est que vide. De but en blanc vous fouillez le sol à la recherche de la clé. Mais rien. Cela aussi me rassure. L’œil pousse un soupir. Je suis à l’intérieur, serrant une rose noire dans ma paume, leurs épines tranchants vivement ma peau. Mais je n'ai pas mal. Non, j'y trouve certainement un réconfort quelconque. J'ai toujours eu l'habitude de retirer les épines avant de vendre mes roses. Mais je n'ai pas mal, non. Vous frappez plusieurs fois à la porte, pourquoi cherchez-vous à entrer ? Je ne suis pas en danger, tout ceci n'est qu'un rêve, vous ne me connaissez même pas. Dans la pièce de mon cœur se tient Evelyne, cette poupée que ma mère avait l'habitude de chérir chaque soir. Celle ci me regarde, mais ne bouge pas, se contentant de battre des cils comme à son habitude. Des taches de noir viennent troubler tout ce blanc. La fleur saigne. Une grimace se dessine sur mon visage, alors qu'une inconsidérée émotion m'envahit. J'ai envie de rire. Les bruits s'estompent, l’œil est fâché. Vous vous mettez à tomber dans ce néant de blanc, vous tombez, encore et encore, vous raccrochant à des bouts de vous ne savez trop quoi, mais c'est flasque, et blanc, très blanc. Votre linge n'a jamais été aussi lumineux. Et vous retombez. Mon rire résonne. Mais je ne me moque pas de vous non, c'est un rire compatissant, un rire qui vous veut du bien, qui vous demande de repasser plus tard. Les taches continuent à peindre le sol de noir. Une pétale tombe. Puis deux. Je finis par lâcher la fleur. Plus aucune trace de marque sur ma paume non, elle m'a guéri, je l'ai tué. Une larme perlant au coin de mon œil droit remonte le long de mon sourcil avant de s'écraser sur le plafond. Vous n'êtes plus là, mais moi si. Vous n'aviez pas la clé, mais moi si. Déboutonnant ma chemise, un long lacé orne mon cou, la clé s'y tient. Lumineuse, telle le soleil tout en étant sombre comme cette rose passée, elle est celle qui me guide. Evelyne bat des cils, elle ne comprend pas. Je lui souris.

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Je suis allongé, allongé dans ce champs de roses. Le ciel est bleu, peut-être un peu trop et le soleil brule littéralement ma peau. Ma chemise est ouverte, fouettant au moindre coup de vent mon torse. La terre est légèrement moite, peut-être un peu trop à mon gout. Elle m'avale et me rejette à son grès. Je ne suis pas à l'aise dans cette position, mais ne bouge pas. Je ne peux pas bouger. Une grimace s'esquisse sur mon visage. C'est totalement ridicule, et totalement effrayant à la fois. Des pétales s'évaporent autour de moi, je ne comprends pas. Le soleil me brule, tellement étincelant que sa couleur en est indescriptible, presque inexistante. Mes yeux ne voient rien d'autre que ce blanc. Je cris, j'essaie de taper du poing, mais rien. Je ne peux pas bouger. Je ne peux pas crier. Seules mes paupières battent à toute vitesse. Mes yeux fixent inlassablement le soleil. J'ai mal. Mais je ne peux rien dire, je n'ai le droit de ne rien dire. Une voix dans ma tête m'explique que je ne suis pas au bon endroit, qu'il est temps de me réveiller, de partir. Mais je suis immobile, les paupières battantes au rythme de ma souffrance. Je ne comprends pas à quoi tout ceci signifie. Il n'y a plus aucune pétale, les roses ne sont plus que des tiges, mortes, amassées les unes sur les autres, à même le sol. La terre est noire, boueuse, et je me sens avaler, étouffer. J'ordonne à mes mains de bouger, à mon corps de se lever, de courir, de pleurer. Mais rien. Une goutte perle sur mon front, le soleil m'achève peu à peu. La clé autour de mon cou n'est que métal fondu, mais je ne l'ai pas senti. Sa forme disproportionnée se dessine au creux de mon torse. Je ne suis pas au bon endroit. La terre, m'avale. Encore et encore, si bien qu'une rose fanée s’agrippe à ma main tentant de la retenir, tentant de me faire souffrir encore un peu plus. Je suis cerné. Elles s'y mettent toutes, s'enroulent autour de mes membres, m’immobilisant un peu plus alors que le soleil se met à rire. Je ne pleure pas. Mes doigts se mettent enfin à bouger, fouillant le sol à la recherche de quelque chose qui puisse m'aider, mais rien. La boule lumineuse trônant au dessus de mon visage se rapproche un peu plus, me brule de tout son être. Elle est furieuse. Le sol m'avale. Je tombe alors que les roses n'arrivent plus à m'arrêter. Le sol m'avale, encore. Je ne vois rien d'autre que du noir, et je tombe. Ma main saigne, je peux sentir le chaud liquide entre mes doigts. Le sol m'avale, et me sauve. En abrégeant mes souffrances. En m’ôtant la vie. Je n'étais pas au bon endroit. Et je bats des cils. C'est totalement ridicule, et totalement effrayant à la fois.

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Mes yeux brillaient, ricochant sur sa peau luisante, son corps chaud. Je n'étais pas habitué à ce genre de relation, mais avait attendu ce moment bien trop longtemps. Je m'étais imaginé un tas de fois cette scène, de façons toujours autant différentes. Dans un premier temps qu'il se serait approché de moi, une rose à la main, un costume sombre sur les épaules et un regard aguicheur. Il m'aurait demandé de fuir, mais je serais resté, pour lui. Il aurait saisi la clé à mon cou, aurait tiré dessus pour se coller à moi, et aurait déposé ses lèvres sur les miennes. J'aurais eu mal, quelques instants. Et puis plus rien. Ses habits seraient rapidement tombés sur le sol, mes mains fouillant son torse dans ses moindres recoins. J'aurais serré la rose dans ma seconde paume, quitte à en souffrir avant de la laisser à la merci du sol. Rien d'autre n'aurait compté, nous n'aurions eu besoin que l'un de l'autre. J'aurais senti son souffle, puis son cœur battant au rythme de ses caresses, les paupières closes. J'étais trop lisse, trop imparfait pour lui. Je l'aurais alors à mon tour supplié de me laisser partir. Mais il n'en aurait rien fait, me scrutant d'un regard sévère et intense. Mes joues auraient rougies, et ma voix se serait fait tremblante, hésitante. Je ne pouvais rien contre lui. Il m'aurait alors avalé, littéralement, de tout mon être je me serais adonné à son corps. Je n'y pouvais rien, j'étais impuissant, j'étais faible. Mais étrangement, je trouvais cela rassurant, de ne rien maitriser. Des pétales noires seraient tombées du ciel et auraient lacéré nos corps, en délicatesse. Mais plus rien ne comptait et je pouvais aisément me raccrocher à ses lèvres, à son regard. Et alors que tout se passait à merveille, que ce fantasme n'était que pure bonheur, il aurait enfoncé lentement une lame dans ma poitrine. Mais je n'aurais pas eu mal, car cela serait venu de lui, et que sa simple présence suffirait à me faire d'autant plus souffrir. La douleur physique n'était rien, mais elle m’achèverait un peu plus. Mon corps s'écroulerait à terre, un sourire aux lèvres. Je trouverais cela amusant, reposant. Un léger sourire s'esquisserait sur mon visage. Et il déposerait ses lèvres sur les miennes. Avant de laisser son corps tomber à mes côtés, se laissant partir à son tour. Dans un dernier souffle, sa main se glisserait dans la mienne, inerte. Je serais mort d'amour. Mais tout ceci n'était qu'une hypothèse, une simple fantaisie parmi tant d'autres, certainement une des meilleures. Comme l'une des pires.