ENDLESS WALTZ
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 je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée.

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MessageSujet: je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée.   je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée. EmptyMer 14 Déc - 1:31

souleyman kaspar2 slijper

soul →
Né le
inconnu
, à
inconnu
Nationalité →
néerlandaise →
État civil →
inconnu →
dealer →
FACE TO THE UNKNOW.



©oaristys
« I CARRY THE SUN IN A GOLDEN CUP,
THE MOON IN A SILVER BAG. »


« Le prêtre
Seigneur, baissez les yeux sur cet homme que vous avez élu, pardonnez son péché né de l'intelligence dont vous l'avez béni.
Hippolyte
Je ne peux pécher contre un Dieu auquel je ne crois pas.
Un long silence
Le prêtre

Non.
Hippolyte
Un Dieu inexistant ne peut pas pardonner.
Le prêtre
Non. C'est à toi de te pardonner.
Hippolyte
J'ai vécu d'honnêteté laissez-moi en mourir.
Le prêtre
Si la vérité est ton absolu tu mourras.
Si la vie est ton absolu -
Hippolyte
J'ai choisi mon chemin. Je suis damné putain. »

« Un deal est une transaction commerciale portant sur des valeurs prohibées ou strictement contrôlées, et qui se conclut, dans des espaces neutres, indéfinis, et non prévus à cet usage, entre pourvoyeurs et quémandeurs, par entente tacite, signes conventionnels ou conversation à double sens - dans le but de contourner les risques de trahison et d’escroquerie qu’une telle opération implique -, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, indépendamment des heures d’ouverture réglementaires des lieux de commerce homologués, mais plutôt aux heures de fermeture de ceux-ci. »

Là, aux creux, dans le fond de l'intérieur, vous le sentez. Vous le savez. Il vous manque quelque chose pour être plein, entier, enfin vous. Entre les entrailles se remue, un serpent aux couleurs d'inconnu, ses yeux d'opales fixent le noir de vos pupilles, tortille sa queue, secoue sa sornette, mélodie incessante dont vous ne pouvez vous défaire. Attrapez votre tête de vos mains, serrez votre crâne entre vos poings, rien n'y fera, je suis le marchand d'âme, de mort dans la vie, celui seul dont la musique apaise les serpents dans les corps, les coeurs. Je suis le vendeur. Sous mon manteau, entre mes doigts, sous ma langue, se cachent vos rêves, les désirs que vous n'êtes pas en mesure de connaître tant que je ne les ai pas éveillés. Je suis l'ange blessé de la lucidité, celui qui ne vous ment jamais. Je bois l'alcool silencieux des démons, l'élixir de la lune aux iris flamboyants, je fascine celui qui se rit de la vie. Je ne donne rien aux morts. Je ne donne qu'aux vivants. Suicidaires jamais suicidés. Dans tout suicide résonne l'ultime cri de la volonté de vivre. Je suis celui qui vous pousse au bord du gouffre sans jamais vous laisser sauter dans le vide. Je suis celui qui maintient l'âme entre l'oxygène et les abîmes. Écoutez ma musique. Ma voix qui vous croise au détour d'une rue où vous êtes allés sciemment, ma voix qui remonte lentement des limbes au vert doux, grondante et ronronnant comme un feu de bois mou. Venez à moi sans savoir, je connais vos désirs les plus profonds, je sais lire sous les masques. Nous allons nous parler, autant de temps qu'il faudra avant de trouver, nous allons échanger, moi, le morceau d'âme qui vous manque, vous, le tissu de chair qui manque à mon blouson. Ainsi, tous deux, nous allons nous rafistoler, nous rendre encore un peu plus entiers, nous compléter sans rien nous devoir. Nous sommes les chiens des rues sans vie, les derniers échangeurs de rêves et d'envies. Vous ne le savez pas encore, mais nos désirs sont les mêmes. Nous sommes faits pour nous entendre. Tandis que le sourire inquiétant de la lune blanche éclairera la ville endormie, je serai là à vous attendre, tout contre un mur assez haut, au détour d'une ruelle sombre, car seule la lumière de la lune autorise la liberté. Les lumières des hommes aveuglent et privent de la vue des sens, l'haleine des hommes est mortelle à ses semblables. Mon souffle vient des pays inconnus, ma voix, une brise amère. Peu m'importe la couleur de votre peau, votre physionomie, le prénom que vous portez, vos erreurs et vos péchés. Je ne fais pas partie du monde de Dieu, du bien et du mal, du bon et du mauvais. Je ne connais pas vos guerres ni vos erreurs, je malaxe vos âmes avec des mains délicates, j'en tire quelques fils, je vous signale quelques failles dans le tissu. Je suis le charmeur des âmes, le marionnettiste des cirques déserts, là où les enfants ne s'aventurent pas, parce qu'ils n'en ont pas besoin, enfants aux âmes pleines et brodées sans trous. Je suis le gardien qui donne leur pitance aux poupées tâchées, je nourris les âmes affamées. Au creux de la paume de ma main; la clé des portes de la perception, des lendemains qui chantent, des nouveaux horizons. Vous aurez peur de moi, mais nous apprendrons à nous connaître. Je suis le dealer, celui qui procède à l'échange, le seul qui s'adresse à vous sans masque ni maquillage, le seul qui vous parle sans mensonge. Je serai là pour vous autant de fois que vous aurez besoin de moi. Je serai l'ange apaisant flottant contre votre échine à chaque instant de faiblesse, de questionnement, de peur, de désir. Lorsque vous le déciderez, je ne ferai plus partie de votre vie, et nous ne nous devrons rien. Jamais. Une fois le deal terminé, je disparais. J'emporte avec moi les mélopées des âmes qui chantent au bord des limbes, les cris de joie de ceux qui ont enfin aperçu la vie. J'emporte au loin les rires des enfants, les cent couleurs du soleil. J'emporte avec moi vos espoirs vains, vos désirs aveugles, la pièce manquante au tricot. Vous me demanderez de rester. Je resterai. Vous me demanderez d'échanger. Nous échangerons.
Je suis là pour ça.
Est-il philosophe ou poète ?...
— Il n'en sait rien —
Lunatique ou simplement bête ?...
— Ça se vaut bien —
Demandez-lui donc s'il chérit
Sa solitude ?
— S'il parle, il répondra qu'il vit...
Par habitude.



oaristys.
21 ans
big brother's watching you


Dernière édition par Souleyman Slijper le Mer 28 Déc - 2:34, édité 13 fois
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MessageSujet: Re: je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée.   je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée. EmptyMer 14 Déc - 1:32

LABYRINTH OF DREAMS.



©COPYRIGHT
« La mer est moutonne !... Ho, mon troupeau !
- C’est moi le berger, sur le sable…
L’enfer fait l’amour. – Je ris comme un mort –
Sautez sous le Hû !... le Hû des rafales,
Sur les noirs taureaux sourds, blanches cavales !
Votre écume à moi, cavales d’Armor !
Et vos crins au vent !... – Je ris comme un mort – »


Le Dealer
Mais maintenant il est trop tard : le compte est entamé et il faudra bien qu'il soit apuré. Il est juste de voler à qui ne veut pas céder et garde jalousement dans ses coffres pour son plaisir solitaire, mais il est grossier de voler lorsque tout est à vendre et tout à acheter. Et s'il est provisoirement convenable de devoir à quelqu'un – ce qui n'est qu'un juste délai accordé -, il est obscène de donner et obscène d'accepter que l'on vous donne gratuitement. Nous nous sommes trouvés ici pour le commerce et non pour la bataille, il ne serait donc pas juste qu'il y ait un perdant et un gagnant. Vous ne partirez pas comme un voleur les poches pleines, vous oubliez le chien qui garde la rue et qui vous mordra le cul.
Puisque vous êtes venu ici, au milieu de l'hostilité des hommes et des animaux en colère, pour ne rien chercher de tangible, puisque vous voulez être meurtri pour je ne sais quelle obscure raison, il va vous falloir, avant de tourner le dos, payer, et vider vos poches, afin de ne rien se devoir et ne rien s'être donné. Méfiez-vous du marchand : le marchand que l'on vole est plus jaloux que le propriétaire que l'on pille ; méfiez-vous du marchand : son discours a l'apparence du respect et de la douceur, l'apparence de l'humilité, l'apparence de l'amour, l'apparence seulement.


On nous appelle les enfants perdus, les jeunes en difficultés, ceux que la nuit avale dans ses ténèbres, sans espoir de retour, de rédemption. La population morale et croyante a peur de nous, nous évite parce que nous sommes les désespérés, les vendeurs de mal. L'humanité sociale et civilisée ferme les yeux lorsqu'elle passe devant nous, refuse de regarder nos visages, nos mains, nos corps, le fond de nos pupilles qu'elle imagine creux et sombre. Dieu est un songe auquel les enfants ne rêvent pas, Dieu est le fantôme des désespérés. Nous portons le visage de la vérité et les corps des enfants trop vite grandis qui marchent toujours plus loin dans les ténèbres où Dieu est absent. Nous sommes les anges de ceux que Dieu a laissé seuls, nous échangeons sans faux-semblants, ce que nous promettons, nous le faisons. L'humanité ferme les yeux devant nous, parce que nous sommes les enfants de la vérité noire, les perceptions éclairées dans les ténèbres qu'elle refuse de voir. L'humanité croit en ses songes. Nous vivons nos songes.
On en déborde, on en dégueule de cette croûte violacée de banalité créative, on voudrait tous ressembler à nos rêves, on voudrait animer les idéaux fixés dans nos tableaux, vous comprenez ce que je dis ?
J'erre comme un fantôme trop plein de vie dans un brouillard gelé qui m’emmène à des kilomètres de là, je me fonds au milieu des pavés ensanglantés, martelés des pas pressés des badauds, les yeux dans le gris éternel du ciel, je peins mon rêve comme la vie se dessine sous mes yeux bleus. Parfois, je me prends des chocs, j’ouvre subitement les yeux sur une réalité à laquelle je ne m’attendais pas. J’en ris, rire d’effroi et de surprise, éclat de peur aux nuages, je fais fuir l’inconnu, je l’assimile en moi. Je suis la clé de la porte au changement, à la perception, aux difficultés, je suis moi-même en difficulté, mais je ne suis que le reflet d’une humanité sans âge, et pourtant, ancrée dans le temps.
Mes paroles sont des idéaux, vieilles utopies, mes visions des rêves. Je suis un être qui ne sait pas être.

« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil ». Je suis un ange. Je n'ai pas peur des ténèbres et des rues noires, je suis l'âme du monde qui glisse entre les rues et les veines. Le monde est immonde, cela va de soi. Le monde a perdu ses enfants. Si, au jardin des plantes ou dans un parc d'enfants, vous vous approchez d'un gamin à l'intérieur de la cabane qu'il a lui même construit, ou encore du jeu en forme de maison qu'il occupe momentanément, que vous lui demandez d'entrer, et que l'enfant vous répond « non », alors sachez que l'enfant auquel vous vous adressez est un enfant corrompu, perdu, sans espoir de retour. L'enfant véritable, pur, répondra toujours oui, à chaque instant de votre vie, vous pourrez entrer dans la maison d'un enfant. L'humanité s'est perdue, on déblatère sur le nombre malheureux de sans abris, sans pour autant leur ouvrir le notre, on se perd dans des élucubrations sans nombre à propos de la réduction de la misère, pendant que les portes restent barricadées. Les ouvrir fait désormais partie de l'utopie. Je suis un homme amoureux des hommes, chaque homme qui ressemble à l'enfant, « cet être que les adultes fabriquent avec leurs regrets », chaque homme qui n'a pas peur d'affronter ses pleurs. Chaque homme qui parle seul dans le noir lorsqu'il a peur. Chaque homme qui se donne l'air fort et qui cède en silence. J'aime l'autre comme on aime le sexe ou les hamburgers, je suis né pour le commerce des hommes et des coeurs, « j'ai les mains sales. Jusqu'aux coudes. Je les ai plongées dans la merde et dans le sang. » Je suis l'homme qui vit pour l'homme.
Á quoi bon se reconnaître dans chaque vision, à quoi bon tenir sa propre main dans la sienne ? Non, l'alambic suprême consiste en mélanger son âme avec une autre d'une nature différente. Changer les couleurs. Mêler les odeurs. Brouiller les perceptions immobiles. Coller côte-à-côte le rouge et le vert. Qu'importe l'harmonie, qu'importe les avis des jurys du bon goût et de la bienséance, qu'importe si l'on éblouit le soleil. L'homme est un loup pour l'homme, l'un et l'autre s'affrontant dans un face à face sous couvert de civilité, alors que l'origine de l'homme trouve ses racines dans le rituel sauvage et le combat. Je veux percer les âmes et connaître l'homme d'en face. Par l'échange. Il y a une part immense de fantasme dans notre conception de l'autre, et une forte probabilité de se réveiller un jour de ses rêves. L'homme est décevant par nature. Notre esprit encercle l'homme d'en face d'un halo de qualités, de défauts, de mysticisme, choisit de l'aimer, ou de ne pas l'aimer, de l'aduler ou de le détester, mais notre perception de l'autre n'est jamais que notre perception, comprenez-vous ? L'essence de l'autre se dégage d'entre vos mains, traverse vos yeux sans s'y révéler, l'Autre reste à jamais un mystère incompréhensible. Un palimpseste indéchiffrable. Et c'est ce qui me plait. « Qui était véritablement cet inconnu, ce soir », je ne le saurai jamais. Peut-être que d'ici quelques minutes, quelques heures, quelques semaines, quelques mois, cet inconnu n'en sera plus un, et la vision de son visage et de son intérieur entièrement inconnus ne seront plus qu'un vague souvenir. Un futur client, peut-être, un pantin débordant de fils invisibles, dégueulant de psychisme que seul moi saurai attraper, faire danser. Toi, tu penses pouvoir connaître l'autre. Mais jamais tu ne le connaitras, comprends-tu ? Tu dessineras, avec tes traits, ton crayon, un visage et ses contours, tu imagineras un caractère, une essence, tu penseras avec des certitudes. Bientôt, tu penseras tout savoir, alors que tu ne sauras rien, et, fier de ta connaissance, tu ne chercheras plus à connaître. Le dessin sera pour toi terminé. Aussi l'autre véritable s'en ira lentement, pour être remplacé par le dessin que toi as toi-même tracé, tu t'y habitueras, tu aimeras ton propre dessin, quand un jour, l'autre se déplacera étrangement, hors des lignes et des courbes que tu as tracées, et tu le diras « changé », « plus le même », et tu le quitteras parce qu'il n'est plus celui que tu avais connu, tu partiras sans savoir qu'il n'a jamais été celui que tu croyais être. L'homme est un rêveur, sa façon de croire que rêve se distingue de réalité est la première cause de son malheur.
J'ai décidé de passer ma vie à échanger aux hommes un monde de réel mêlé au rêve contre de quoi me permettre de rester un homme. Je suis l'enfant des temps modernes, le rêveur sacré du peuple, la voix tout au fond de l'abîme, la banalité incarnée. Plus on est ordinaire dans le milieu des hommes, plus on passe pour extraordinaire, et plus on est extraordinaire dans le milieu de la vie, plus on est ordinaire dans celui des hommes. Sachez que les anges sont muets et invisibles.
― L'idéal à moi : c'est un songe
Creux ; mon horizon ― l'imprévu ―
Et le mal du pays me ronge...
Du pays que je n'ai pas vu.


On dirait notre âme à tous. Un petit garçon fou. Lâché dans la jungle.
Avec un gros pistolet.


Dernière édition par Souleyman Slijper le Lun 19 Déc - 21:37, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée.   je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée. EmptyMer 14 Déc - 1:32

THE BUG.



©COPYRIGHT
« Father, yes son, I want to kill you. Mother... I want to fuck you. »


01.20am

- Qu’est-c’y fout là, ce p’tit? Ricardo, viens voir par ici.
- Ben c’est quoi ça ? D’où tu viens mon gars?

Les hommes en uniforme. Je les déteste. On dit qu’ils sont là pour nous protéger. Pourtant, pour moi, ce sont les grands méchants loups. Je recule, effrayé, mon bâton sale entre les dents, mon béret parisien écrasant ma tête minuscule pleine de poux, ma salopette trouée trop grande pour moi. Je marche sur mon pantalon, je manque de tomber à la renverse sur le trottoir, écraser mon crâne d’enfant sur les pavés de la ville sombre. Heureusement, l’odeur de maman. Ce parfum si fort, qui pique les yeux quand elle vient de le mettre, je l’ai dans le sang. Ses cheveux blonds sales. Ses longues jambes douces et brillantes. C’est le collant, parait.
- Laissez-le, c’est mon garçon.
Maman m’attrape entre ses mains, comme une petite chose toute molle et sans énergie. Je n’ai plus peur, et je recommence à mâchonner mon bâton. Les policiers font peur à maman. Elle me recule, elle nous recule, mais les policiers s’avancent vers elle avec des rictus sur leur visage.
- T’as un gosse, Brandy? Tu sais pas te protéger, petite pétasse?
- Les services sociaux sont au courant?
- Le papa, au moins, il le sait ?

Rires. Je sens maman se transformer en lionne, en tigresse blanche, ses poils blonds se hérissent et elle montre ses dents longues, sort ses griffes. Je n’ai peur de rien.
- Foutez moi la paix, on n’a rien fait.
Soudain, les deux policiers s’approchent, et maman me recule tellement fort que je manque de tomber à la renverse. Ils attrapent maman, un par les épaules, l’autre par les hanches. Elle crie comme une panthère et donne des coups pour se dégager.
- Mon fils est là, mon fils, bande de salauds!
Les policiers rient. J’ai très peur.

17.55pm

- Fils de pute.
Je sors du collège. Je trace. Les grands du quartier sont là à me suivre, je sais même pas c’qu’ils me veulent, ils insultent maman, tout le temps. Ils marchent derrière moi, et m’attrapent par les bras, de chaque côté. Je ferme les yeux et crache par terre.
- Regarde comment il marche, c’est un petit pédé.
- T’es pédé, Souleyman?
- J’suis pas un pédé.

Je me dégage comme un petit fauve et redresse mon cartable sur mon dos, crache par terre. Ils rient. Pourquoi les gens rient-ils quand les choses ne sont pas drôles ? A la maison, on n’a pas beaucoup d’argent. Je vis avec maman dans un tout petit appartement, entre beaucoup d’appartements, elle passe ses journées avec moi, m’aide à faire mes devoirs. Ne me parle jamais de mon père. Le soir, elle s’en va au travail, toute la nuit. Les autres mamans ne travaillent pas la nuit, sauf celle de Josh Perkins, qui est surveillante de dortoir. Les autres disent que maman est une pute. Une pute, c’est une dame qui se laisse tripoter par tout le monde. Maman n’est pas comme ça, maman crie quand on la touche. Ce sont les autres qui tripotent maman, maman n’a pas le choix. Et puis, si maman faisait… « ça », elle aurait des tas de bébés, et le seul bébé, c’est moi. Alors maman n’a fait… « ça » qu’une seule fois, pour me faire à moi. Maman ne veut pas parler du travail, elle dit que le travail, c’est seulement pour avoir assez de sous pour manger, que la vie, c’est pas le travail, maman dit qu’il faut rêver dans sa vie, elle veut que j’ai un monde dans ma tête, et quand elle pleure, quand on crie sur maman, elle me demande de m’en aller dans mon monde.
Dans mon monde, il y a des tas et des tas de machines, ce sont des robots gentils qui sont venus sur terre et ont tué tout le monde, tout le monde sauf maman et moi. Il y a des jardins verts et des fleurs de toutes les couleurs, des manèges et des robots gris, gentils. Ils ne parlent pas, mais on joue quand même à plein de jeux. Dans mon monde, on ne travaille pas, on n’a pas besoin de sous, il n’y a pas de putes, et pas de pédés.

20.30pm

- L’école dit que tu n’es pas apte à suivre les cours de l’an prochain. Souleyman?
Maman me regarde avec son air sévère, et moi, je veux qu’elle se pousse pour regarder la télé. Elle éteint la télé. Elle est vraiment en colère.
- Souleyman, tu fais des bêtises?
- Non.
- L’école dit que tu es absent. Jamais là!
- … Il faut aller à l’école, et travailler, il faut gagner des sous, tu es assez grand pour le comprendre, non ? Grandis, Souleyman, merde, grandis un peu, beaucoup!

Maman m’a demandé d’effacer le monde dans ma tête, le monde avec les robots. Elle veut que je sois grand, responsable, que j’aille à l’école. Mais traîner avec les grands, c’est tellement plus amusant. Maman ne veut plus que je traîne avec les grands.
L’école a appelé. Il parait que je suis renvoyé.

22.46pm

Je décide d’aller chercher maman au travail. J’ai la grippe, j’ai l’impression que je vais mourir, elle est la seule qui sache ma soigner. Je connais la rue où elle travaille, je m’y rends. Il y a des ouvriers qui sortent des usines, ou bien qui y rentrent, des enfants, noirs, souvent, qui jouent dans les rues, avec des poches en plastique. Il y a des hommes en veste qui vous regardent en coin. Un qui m’arrête. J’ai la gorge en feu, je ne peux même pas parler.
- T’as besoin de quelque chose, petit?
Ma gorge me donne les larmes aux yeux, je secoue la tête pour dire non et reprends mon chemin. Là où ça clignote en rose, c’est là où maman travaille. Il y a deux dames devant l’entrée en U à l’envers. Elles me regardent comme si elles n’avaient jamais vu ça de leur vie.
- On les prend si jeunes, maintenant?
- T’es con. C’est pas le petit de Brandy?
- Hé mon chaton, tu cherches quelqu’un?

J’ai de la fièvre et je m’évanouis.
- Souleyman? Souleyman!
J’ouvre les yeux. Une dame est penchée sur moi, je suis allongé dans un lit tout chaud, un bol fumant posé sur la table de nuit, et une compresse froide sur le front. Je ne connais pas la dame, mais j’ai moins mal à la gorge.
- Il faut qu’il voie un médecin ce gosse.
La dame qui a parlé est grosse et habillée en dentelles noires. Elle porte jusqu’au lit un bouillon de légumes.
- C’est Brandy, ta maman, hein?
Son sourire est rassurant, et je fais oui. Elle se retourne et gueule.
- Faith! Elle est où Brandy?
Quelques secondes, et une autre voix de dame gueule.
- Avec un client, à cette heure. Pourquoi?
La grosse dame me regarde d’un air inquiet. Je ne vois pas pourquoi, maman travaille. Je suis si fatigué que je m’endors. Je suis dans le monde des robots. Nous avons construit un avion mécanique, avec de grandes ailes de fer, je monte à l’intérieur, il y a même un casque d’aviateur ! Vrouuum, j’appuie sur les commandes, il roule, roule, prend de la vitesse, en haut d’une falaise, on s’envole ! Je regarde à droite, le ciel, les nuages nous disent bonjour, mais les ailes… Les ailes de l’avion se changent en dentelles noires, trouées, nous perdons de l’altitude, nous tombons dans le vide. Le cœur aux lèvres, j’ouvre la bouche pour hurler. Aucun son. Des rats dans le ciel, partout, ils pénètrent mes chaussures, mes chaussettes, mon t-shirt, des queues de rat sur le crâne, sorcière, je…
- Il délire.
- C’est la fièvre.
- Brandy, enfin te voilà! Regarde ton petit.

La main froide de maman contre mon front. J’ouvre les yeux. Je suis guéri.

03.20am

- Bon, tu la prends cette dope, ou merde ?
- Je…Elle est chère, ta dope.
- C’est comme tu veux. J’ai aussi de la merde américaine moitié prix, si tu veux te bousiller.
- Ca va, passe moi la première.

Maman a trouvé un monsieur. Il prend soin d’elle et l’aime bien, parait. Parait aussi qu’il veut pas de moi. J’ai quinze ans, a dit maman, je peux être autonome. Maman me laisse l’appartement, qui tombe en ruine, et va habiter chez son monsieur, le plus souvent. Je ne vais plus à l’école. Je viens juste d’arrêter. A quinze ans, l’école, ça craint. On m’a déjà demandé pourquoi je me droguais. On m’a dit que j’avais des tas « d’autres alternatives ». Les gens dont la vie s’écoule aussi parfaitement que de la crème pâtissière sur un joli gâteau s’imaginent toujours que la vie est pleine « d’autres alternatives ». Quand on est en plein dans une vie qui ressemble à de l’écume sur du sable, sans cesse ravalée par des vagues de plus en plus violentes et salées, quand on boit la tasse, se noie, c’est étrange comme les « autres alternatives » n’apparaissent pas aussi facilement que le disent les autres, ceux qui vivent dans des châteaux de contes de fées, ce qui se permettent encore le luxe de rêver.
Maman est passée me voir. Elle est arrivée au mauvais moment : les fenêtres n’avaient pas été ouvertes depuis un moment, les grands étaient montés à la maison, et nous avions des seringues plantées dans les bras. Maman a crié, a foutu tout le monde dehors, sauf moi, et puis elle a beaucoup pleuré. Elle a dit que j’allais vivre chez Mrs Jenkins, enfin, avec Mrs Jenkins et sa fille, qui habitaient un appartement de l’immeuble à côté. Elle a dit que je devais être sage. Je lui ai demandé « et toi », elle m’a répondu que le monsieur lui offrait une vie qu’elle avait toujours rêvée, que nous nous retrouverions plus tard. Alors j’ai compris. Ça m’est tombé dessus comme la foudre. Je ne retrouverai plus jamais maman. Fils de pute.

à partir de cet événement, plus aucun élément du passé de souleyman slijper n'a été retrouvé. mrs jenkins affirme qu'il n'est pas resté chez elle plus de quelques mois, avant de disparaitre dans la nature. souleyman slijper n'a plus jamais été vu dans une boutique, un restaurant, n'a plus jamais été géolocalisé par aucun outil technologique. aucun ami d'enfance, aucun contact n'est capable de parler de souleyman slijper.


Dernière édition par Souleyman Slijper le Mer 21 Déc - 18:07, édité 7 fois
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MessageSujet: Re: je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée.   je chante la chaleur à visage de nouveau-né, la chaleur désespérée. EmptyMer 14 Déc - 1:32

DIRTY PLEASURE.



©COPYRIGHT
« et lorsque je planais et que je levais la tête vers le ciel, c'est comme s'il s'ouvrait soudain pour effacer de cette terre toute trace de mon être insignifiant. »
(pavel streshnev)


La poudre blanche s'évade en une fumée écarlate et froide tandis qu'elle se dépose au creux de la cuillère qui ne tremble pas. La flamme du briquet éclaire ses reins de métal excités, fait frétiller le mélange qui fait tousser les anges. Une odeur âcre se répand lentement, tandis que les rebords de la poudre se mettent à fondre et buller silencieusement. La queue de la cuillère se passe entre les dents blanches, bien maintenue, tandis que l'index palpe la veine, heureuse élue. Le collier de caoutchouc enserre l'avant bras, fait gonfler la veine d'allégresse et de désir. Langue qui lèche doucement la queue de métal, alors que la seringue blanche se prépare. Tige salvatrice plongée avec appréhension dans la veine qui éclate en un soupir de plaisir, laisse couler son sang rouge dans le bec d'argent de ce qui l'a pénétré avec tant d'attention. Attention, encore une pression. Le sang précieux recouvre son antre, mêlé à son partenaire éclatant. Soupir expiatoire et regard vers le plafond, merci aux anges. Là, sur la blessure à vif, ça démange. Pupille rétrécie, bouche entrouverte, cette sensation de juste avant de chier, dans tout le corps, jusqu'au bout des doigts, des nerfs, l'intérieur du crâne tout entier s'enivre lentement, absorbe les substances qui se jettent dans les rivières des veines, de sang, irriguent le corps et l'âme.
Le garçon se tourne vers le jeune homme en veste marron appuyé dos au mur près de la fenêtre, uniquement éclairé par les lampadaires d'or de la rue. S'il le pouvait, il l'embrasserait.
- C'est de la bonne, mec.
Pas de réponse, pas de mouvement, il semblerait que l'Autre regarde au dehors comme s'il était seul. Alors, le garçon pose sa seringue, et sort de la poche arrière de son jean une poignée de billets. Le regard du vendeur étincelle d'un coup d'une lueur d'argent, et se pose sur le client. Chat du fond des gouffres en puissance. Impitoyable fournisseur des transes.

J'ai des trucs et des machins, pour toi, des trucs et des machins, pour toi. J'ai des caresses et de l'amour, en masse, j'ai des bonbons de toutes les couleurs. Derrière mon bar, je secoue mon shaker au son de la musique qui me transporte, qui te transporte, si tu ignores qui je suis, tu le sauras bientôt. Je suis à toi, je suis pour toi, j'ai tout ce qu'il te faut. Homme, femme, animal ou damné. Je me présente, le clown au masque de l'humanité, l'ange au visage de vérité. Si tu ne sais pas ce que tu veux, nous allons le trouver. Si tu ignores où se cache ton désir, nous allons le traquer. Si tu as perdu tes rêves, allons les déterrer. Je suis le pantin flamboyant aux ficelles de poudre d'étoiles, le tisseur d'âmes sans toile. Je suis le seul qui donne quand on se pend à son bras, je suis celui dont tu suis sans le vouloir le pas. Entre les rayons verts de la musique, nos regards se croisent. Tu m'aimes déjà. Sans savoir pourquoi. J'ai des trucs et des machins, pour toi, des trucs et des machins, pour toi.
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